Présentation de l'exposé de Jacques Guinberteau, les agarics

 

Phylogénie & Taxinomie des Agarics : Vers de nouveaux critères de classification.

Par J. Guinberteau. Ingénieur d’Etudes à l’Unité de recherche MycSA –INRA Bordeaux

 

Le Genre Agaricus qui comprend environ une bonne centaine d’espèces en France, partage le paradoxe d’être à la fois l’un des plus populaires (« Rosé des prés ») et l’un des plus complexes parmi les Basidiomycètes au niveau de sa taxinomie. Une des raisons majeures en est la relative faiblesse des caractères discriminants usuellement pratiqués (comme la couleur) et une relative monotonie morpho-anatomique des espèces au sein du Genre.

La biologie moléculaire, avec notamment la comparaison de certaines régions du génome comme les séquences ITS, représentent un outil de choix pour la classification des basidiomycètes qui subit actuellement une refonte générale.

Ceci nous permet aujourd'hui, de valider les espèces d’Agarics qui ont été essentiellement définies sur la base de critères morphologiques estimés pertinents du point de  l'évolution.

Le genre Agaricus se subdivise ainsi en une dizaine de grandes sections monophylétiques : les Sections Bivelares, Chitonioides, Xanthodermatei, Agaricus (ex Campestre), Sanguinolenti, Spissicaules, Arvenses & Minores, Brunneopicti.

 

Une première section du Genre, appartient à celle du champignon de Paris (Agaricus bisporus), d’importance économique majeure. Parmi les sections qui ont été proposées par différents auteurs, à savoir Hortenses, Edulis, Bitorques, Duploannulati, Bivelares,  c'est cette dernière, tout en tenant compte des critères d'antériorité, qui est la plus conforme aux  résultats moléculaires moyennant quelques modifications (exclusion de A. bernardii et inclusion de A. cupressicola). Cette section, une fois amendée, correspond à un clade extrêmement robuste comportant au moins huit espèces : A. bisporus, le complexe A. subfloccosus (2 espèces), le complexe A. devoniensis (à éclaircir), A. bitorquis, A. subperonatus (= A. cappellianus = A. vaporarius), et A. cupressicola.

 

Une deuxième section importante est celle des Xanthodermatei ouagarics "jaunissants" et "non comestibles voire toxiques" qui forment qu’un seul clade, confirmant la validité des caractères de la section (jaunissement rapide et souvent intense et surtout odeur phénolique). Nous y reconnaissons actuellement  21 entités spécifiques dont 7 nouvelles espèces inter continentales (Europe / Amérique du Nord). Il peut paraître surprenant que  la section Xanthodermatei  rassemblant que des agarics "non comestibles" ou toxiques semble, contre toute attente, être la section la plus proche de la section du champignon de Paris ou Bivelares (réunissant des espèces rougissantes et comestibles ) !

 

Contrairement à la couleur, le critère odeur, bien qu'étant sujet à interprétation et parfois subjectif, se révèle être un des meilleurs critères pertinents, voire parfois le seul, pour classer une espèce dans une section sans l'aide d'analyse moléculaire. Ainsi toutes les espèces de la section Xanthodermatei ont une odeur de phénol. Ces espèces sont aussi les seules du Genre à être toxiques mais divers composés phénoliques volatils ou non, sont en cause. Le maintien de la toxicité et les variations des métabolites secondaires phénoliques dans l'ensemble de ce clade au cours de l'évolution, suggèrent que ces composés pourraient avoir un rôle défensif vis à vis d'animaux ou de microorganismes avec des possibilités de coévolution.